C'est par amour du calme, de la tranquillité et des grands espaces que Manu Venturi est arrivé au vin. Il est le fils d'un autre grand vigneron corse, mais, dans ce milieu comme dans d'autres, la filiation n'est en aucun cas un gage de succession, de volonté et encore moins de réussite. Sa victoire, il la doit d'abord à son caractère indépendant, au rapport qu'il entretient avec le cœur de cette Corse, isolé de tous, qui a pour compagnon de jeu l'intemporalité des espaces sauvages. Comme les bergers, il retrouve le goût de l'observation, l'interaction des éléments naturels et le potentiel de chaque pied de vigne.
En observateur réfléchi et en chercheur méthodique, il va éprouver toutes les approches scientifiques ou empiriques, ne se laissant jamais dicter leur conduite par aucun courant. En être dogmatique et clairvoyant, il cultive sa vigne en biodynamie étape par étape, et refuse de s'enfermer dans une posture qui viendrait contrarier son bien le plus précieux : sa liberté. Tel un contemplatif qui choisit la retraite, il acquiert une connaissance de ses terroirs comme purent le faire, quelques siècles en arrière, les moines bourguignons. Avec précision et rationalité, il découvre l'immense potentiel de cette terre complexe, ses sens toujours en alerte, sans jamais se satisfaire ni interrompre sa quête. Parlant peu et écoutant beaucoup, ce colosse a une capacité à absorber les signaux naturels et à se nourrir de toutes les informations extérieures avec une acuité étonnante. Le résultat est perceptible dans ses vins une synthèse de pureté, d'expression complexe, de dimension et d'originalité. Il est de ces chercheurs perspicaces qui trouvent en s'inspirant de ce qui est à créer. Comme un architecte, il façonne ses vins, couche après couche, n'hésitant jamais à débâtir, retaillant chaque pierre pour que sa vision de l'harmonie soit totale. À sa manière, il perpétue la tradition de la vieille Europe et donne au vin une identité propre qu'il conviendra d'expliquer le moment venu. De sa voix tranquille et posée, il parle aux curieux de la traduction d'un terroir pluriel en un liquide mystérieux d'une manière étonnamment intelligible. Par ses vins, il prouve que la complexité peut s'envisager à plusieurs niveaux et qu'il n'est pas nécessaire d'apprendre pour comprendre. Une simple traversée des lieux ou l'attention portée à un verre suffisent à offrir une tranche de passion, de marginalité, ou tout simplement du bon temps. Il est doux de pouvoir gagner l'inaccessible et de se rendre compte que vouloir et pouvoir sont étrangement liés lorsque naturellement le palais et le cœur ne font qu'un seul corps. Si le rapport au temps vous interpelle et que le monde tourne trop vite pour vous, pensez simplement qu'un seul verre de ce genre-là vous replacera au milieu des éléments et l'immensément petit deviendra sans doute 'éminemment grand. A salute.
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